vendredi 10 mai 2013

Cours d'introduction à la philsophie reçu en première année de graduat à l'USAKIN


 

Cours d’introduction à la philosophie

Université Saint Augustin (2011-2012)

Prof. Dr. Mbungu Mutu, cmf

Préambule

Peut-on vraiment parler d’une introduction à la philosophie ? Une telle tâche ne se révèle-t-elle pas non seulement impossible, sinon utopique ? L’étudiant à qui l’on veut rendre ce service ne sera-t-il pas déçu étant donné que celui qui s’engage à la faire ne peut lui fournir que des concepts plus ou moins vagues ou plurivoques ? Peut-on, en outre, déterminer de façon précise la nature de la philosophie, c’est-á-dire lui donner une définition définitive et absolue ?

Ces questions qui peuvent rester sans réponse exacte montre effectivement qu’une introduction à la philosophie peut engendrer (ou simplement engendre) déception et mécontentement, découragement et même « abjection ». Cette hypothèse que nous avançons se confirme davantage, du moment que le « novice » en philosophie est invité à aborder cette introduction en « philosophe », c’est-à-dire en celui qui s’efforce d’entrer dans la pensée d’autrui. En effet, plusieurs penseurs soutiennent qu’une manière pour l’esprit de s’initier et de se familiariser avec la philosophie est tout simplement de s’engager à l’exercer[1].

Si c’est par un chemin propre (du dedans) que l’on est obligé d’entrer dans la grande forêt de la philosophie, l’on se rend compte qu’une initiation (démarche extrinsèque) semble, du coup, se révéler une barrière à l’exercice philosophique. Toutefois, l’on ne peut « abandonner la nécessité d’une initiation à la philosophie »[2]. Et Nkeramihigo s’en explique : « En tant qu’acte spécifique de l’esprit humain, la philosophie exige une initiation pour que l’on puisse la pratiquer selon son propre objet et ses propres exigences. Seulement, enchaîne-t-il, l’initiation que nous exigeons doit être un chemin dans la philosophie, c’est-à-dire un ̎Chemin…qui doit être d’une espèce et avoir une direction telles que ce dont la philosophie traite nous aborde et nous touche, et ceci dans notre être même̎ »[3].

Pourtant, il se pose la question de savoir là où l’on peut trouver ce chemin. Dans le cadre de l’initiation et de sa question, il faut dire premièrement et cela par rapport à l’initiation, que la question qui importe est celle qui conduit à la définition de la philosophie (Qu’est-ce que la philosophie ?). En effet, l’enquête que l’on mènera, et qui du reste se veut totale et originelle, donnera à cette interrogation une direction, capable de l’insérer dans le destin humain du questionner philosophique. Deuxièmement et cela par rapport à la question même, elle est en soi un chemin qui a une histoire. C’est autant dire que la seule initiation possible consiste à entrer dans l’histoire de la philosophie[4].

Par ailleurs, avant d’entamer cette recherche définitionnelle et de s’engager sur le chemin historique, il faut commencer par voir les différents contours (éléments) qui se retrouvent autour de ce terminus – Philosophie -, à savoir la philosophie comme « objet », comme « concept » et comme « expression ».

(1) Philosophie comme « Objet » ou comme « phénomène »

Logiquement parlant, l’« objet » est la réalité telle qu’elle se présente (existe) en dehors du sujet, même si celui-ci n’en est toujours pas conscient. Il sert de « support » à la pensée[5]. Ainsi appréhendée, la philosophie (comme objet/phénomène) se présente á nous comme une réalité pluridimensionnelle (plurivoque). En effet, nous avons en face de nous des penseurs de toutes sortes : races, continents. Tout en se disant philosophes, ils ne vivent pourtant pas tous de la même manière (à cause de différences dans les convictions religieuses, politiques, etc.), développent des philosophies/Thèses singulières et écrivent chacun des œuvres ou des médiations (philosophiques) que l’on peut « facilement » se procurer. En outre, l’expression littéraire des œuvres et méditations ne sont toujours pas homogène : la poésie y côtoie l’aphorisme ; le discours absolument cohérent y rivalise avec la légèreté descriptive. Certaines pensées se sont mues en « Systèmes philosophiques » en inspirant des penseurs autonomes et regroupant le plus souvent ceux qui, pensant avoir les mêmes intuitions et les mêmes préoccupations, ont décidé de faire ses « disciples » d’un maitre plus sûr.  

C’est en partant d’une telle thèse que l’historien de la philosophie Émile Bréhier (1876-1952) affirme qu’il existe trois niveaux de l’histoire de la philosophie qui correspondent également á trois niveaux de compréhension de la réalité qu’est la philosophie : (i) la philosophie comme fait social et psychologique : l’on a ici l’histoire de la philosophie qui est une histoire des idées et une sociologie de la connaissance ; (ii) la philo comme fibres de pensées qui se noueraient et se dénoueraient sans jamais arriver à produire une pensée neuve : c’est l’histoire de la philo comme histoire critique de la multiplicité de sources se disputant la primauté et la crédibilité ; (iii) la philo comme entrée dans la pensée d’un auteur en voulant jouer jusqu’au bout la carte de la cohérence et en cherchant á la comprendre par l’unité du système : c’est l’histoire de la philo comme histoire systématique à partir des courants et des penseurs[6]. Évidemment en situant á ce troisième niveau où s’opère une véritable histoire de la philosophie, il reste toutefois à répondre à la question « qu’est-ce que comprendre une philosophie ? »[7].  

(2) La philosophie comme „Concept“

- En Logique, „La conception est l’acte de penser un objet (…) Et le Concept est la représentation mentale d’un objet“[8].

- En  tant que Concept, la philosophie renferme une double dimension.

(i) la première dimension se situe du côté de l’observateur de la « chose philosophique », c’est-à -dire l’homme du dehors. À travers cette dimension se dévoile un désespoir qui semble le plus souvent accompagner l’étonnement ou la plainte du non-philosophe devant un penser, un agir, une expression, un comportement singuliers : « C’est un philosophe ! »[9].

À cette réaction du non-philosophe, s’ajoute une autre réalité non moins importante. En effet, comparée à d’autres sciences, la philosophie si elle est vraiment une science, est une science scandaleuse. Car alors que les autres sciences se déterminent par les progrès et leur contribution à la « civilisation humaine », la philosophie elle, semble éclater sous le poids de la multiplicité de ses visages et introduit incessamment au trouble  et à la déception.

(ii) la seconde dimension se situe du coté des philosophes eux-mêmes. À l’intérieur même de la philosophe, certains penseurs regrettent que la philosophie en se « fonctionnalisant », en se « systématisant » et en sombrant dans l’entreprise « Livresque et littéraire », ait débouché sur cette étrangeté dont il est question dans le discours du non-philosophe[10].

D’autres se défendent d’être en dehors de la réalité concrète de la vie. Il n’y a pas de « science » qui soit proche de la réalité que la philosophie[11]. En effet, ils rejettent l’idée du philosophe comme savant capable de dire un mot pour chaque situation ou chaque problème de la vie courante. Pour eux, le philosophe est aussi un ignorant[12]. Dans ce sens, ils font un rejet de l’idée du philosophe « savant », i.e. capable de dire un mot pour chaque situation ou chaque problème de la vie courante. Le philosophe, pour eux, est aussi un ignorant[13].

Il existe d’autres enfin qui font une soigneuse démarcation entre la « Philosophie sans science » et la « Philosophie professionnelle (ou mieux des professionnelles) » et font de la première une affaire de tout homme, une essence propre à l’existence humaine en tant que telle. La philosophie surgit avant toute science et cela là où les hommes vivent et s‘éveillent. Cet éveil n’est ni le propre d’hommes « sains » ni le privilège des êtres « bien pensants ». La philosophie est donc liée à l’existence humaine dont « l’être-en-route » (Auf-dem-Weg-sein) constitue en même temps l’essence fondamentale et le destin premier[14].  Elle est donc un état qui commence dès l’enfance et ne se retrouve dans son état innocent que dans le questionnement des enfants et dans le discours « incohérent » du fou ou encore dans l’expérience matinal du sommeil s’évanouissant[15].

La philosophie présente dans toutes les sphères de la vie humaine, se retrouve dans les discours philosophiques courants, les proverbes, les convictions régnantes et depuis de l’histoire, dans les mythes[16].

Cette thèse jaspersienne d’une philosophie infuse en tout homme et présente ainsi dans toutes les sphères de la vie humaine semblent pourtant ne pas correspondre á un M. Heidegger (1889-1976) pour qui la philosophie a une origine précise : le monde grec (« le peuple élu de la raison »[17]). Tout part du mot grec « Philosophie » (Philosophia) et renvoie ainsi á la tradition « gréco-occidentale »[18].

Nous n’avons pas besoin de pousser la description des différentes conceptions de la philosophie chez les philosophes, car cela ne servirait pas à grand-chose. En effet, les réflexions reprises ci-dessus révèlent bien les contradictions inhérentes qui existent à l’intérieur et à l’essence même de la philosophie. De fait, ces contradictions deviennent plus claires lorsque l’on se penche sur « les expressions philosophiques » qui disent ce qu’est la philosophie. 

(3) Philosophie comme « expression »

Pour la logique formelle, l’expression est la formule que l’on donne à une chose concrète. La dite formule peut se faire en en soi-même ou encore dans une langue[19]. Aborder la philosophie sous l’angle d’expression, c’est rejoindre le point de départ (objet du cours) qui consiste à trouver une définition de la philosophie. Il est évident que l’on a en face une entr4eprise difficile dans la mesure où plusieurs doivent encore être éclairés, notamment la différence entre ce qui se dit sur la philo et ce qu’elle signifie effectivement en tant que « mot ».

Chap. I. Un bref aperçu sur le domaine de la philosophie

Arrivés au point de l’expression, les questions à aborder dans ce chapitre sont les suivantes : « Qu’est donc la philosophie ? » « En quoi consiste-t-elle ? » « Comment se distingue-t-elle de toute autre chose ? »

1.      L’objet de la philosophie[20]

1.1. Savoir ordinaire et connaissance scientifique

Une saisie de ce dont s’occupe la philosophie doit commencer par une distinction entre le savoir ordinaire et la connaissance scientifique, dans la mesure où il est couramment admis que la philosophie est un savoir et qu’inversement tout savoir n’est pas philosophique.  

Un regard sur l’homme ordinaire, i. e sans formation spéciale, montre que celui-ci a connaissance du monde où il se trouve, de ses semblables avec qui il partage la vie en société. Il a également conscience de soi-même, de ses idées, tendances et sentiments. Il a conscience d’une certaine régularité du déroulement des événements et du changement même de la nature environnementale et humaine. Il a une expérience du cours normal de la vie (des choses) et c’est grâce à elle que l’on peut se maintenir en vie (faire attention et respecter les soins incessants : se protéger des dangers, refaire ses forces, connaître les besoins). C’est au fond, cet esprit d’observation qui est la première condition de l’homo faber. Pourtant, l’être humain ne s’enferme dans sa propre expérience. Il a besoin des autres. Grace au langage (sous toutes ses formes), la communication peut s’établir le savoir se transmettre de génération en génération. C’est dire que l’activité individuelle aussi riche qu’elle soit a besoin du capital collectif pour vraiment demeurer efficace[21].

L’homo faber n’est pas seulement un simple observateur. Il est aussi un curieux, i.e celui qui éprouve le besoin de savoir, de connaître. En effet, cela lui procure une satisfaction, un plaisir naturel. Ses recherches (observations, interrogations, renseignements, écoute des histoires des autres) ne se limitent pas à consigner les faits ou encore á demander l’explication, mais à provoquer en lui un certain étonnement, c’est-à-dire « un moment où l’évidence du monde disparaît pour laisser la place á un inconfort, un déséquilibre qui impose de se mettre en mouvement, comme si on avait soudainement l’impression d’être déplacé »[22]. Ce déséquilibre finit par conduire au questionnement philosophique s’introduisant par « Pourquoi ? ». Si le moindre peut devenir pour le philosophe un problème (un étonnement philosophique), et donc conduire au pourquoi, c’est dire qu’il doit toujours exister une raison pour tout être, tout acte, toute situation tout comme aussi pour l’ensemble de l’univers.

Dans le cheminement qui conduit de l’étonnement à la recherche d’une argumentation ou d’une justification, l’individu est habité par le souci de la vérité. C’est dire qu’il est conscient que l’homme par sa vie et son agir, peut se trouver dans l’erreur : « Errare humanum est ».  À travers l’étonnement (le doute) et la recherche permanente de la vérité, l’homme prend de plus en plus conscience que l’on peut échapper à l’erreur[23]. C’est en cela que consiste l’esprit critique dont l’homo sapiens sait faire preuve. 

L’esprit critique ne doit pourtant pas éloigner l’homme de sa société. C’est dedans qu’il doit trouver la suggestion de solution à ses inquiétudes ou mieux, c’est dedans qu’il trouvera de nouvelles interrogations. C’est donc à travers l’expérience et l’explication que l’on peut avoir en dialoguant avec la société que l’homme se voit éclairer sur lui-même, sur les autres et la valeur des êtres. L’esprit critique doit donc lui fournir une connaissance qui doit désormais devenir la règle de sa vie, c’est-à-dire dans l’appréciation des valeurs et la détermination de son agir, ainsi pourra-t-il alors cheminer comme il se doit, remplir son devoir et atteindre sa fin.

Comme on peut le remarquer, le savoir de l’homme comporte, dans sa factualité et son ordre apparent, des explications quant à la raison d’être des choses et des hommes à partir de son expérience, des recherches personnelles et de ses contacts avec les autres. Ce sont ces différents éléments qui guident l’être humain (dans sa vie matérielle, intellectuelle et morale). 

Disons que le savoir humain, ainsi que nous venons de le décrire, n’est donc pas une chose simple. Même en tant que tel, science et philosophie peuvent tenter de l’analyser pour essayer de le déterminer. C’est au fond le processus auquel des siècles durant, on assisté. C’est-à-dire le passage du savoir ordinaire en connaissance scientifique. La question qui demeure est celle de savoir comment, au fond, s’opère ledit passage. De manière générale, la science est un ensemble de connaissances qui s’obtiennent à partir des procédés méthodiques et constituées en un système cohérent[24]. 

Disons premièrement que la science a affaire aux connaissances, c’est-à-dire d’actes humains qui ont un contenu objectif. La connaissance vise donc la vérité. Et ce faisant, connaître, c’est (chercher à) atteindre consciemment, dans l’acte même de connaitre, l’objet tel qu’il est (objectivité). Dans cette recherche de la vérité/objectivité, la science s’attache à la qualité du savoir humain et non seulement à la quantité[25].

Un autre trait caractéristique de la science est le désintéressement. À ce niveau, conséquences utiles et applications pratiques des connaissances acquises n’entrent pas formellement en compte. L’on essaie de s’en tenir au « regard serein de la pure connaissance »[26].

Au désintéressement, il faut joindre le souci de la méthode (meta=avec, selon, suivant et odos=voie, route). En effet, les recherches scientifiques ne suivent pas le hasard des circonstances de la vie. Elles suivent une marche (plan) raisonnée (une mûre réflexion) pour atteindre un but (une fin)[27].

Au souci méthodique s’ajoute enfin le principe de systématisation. Il s’agit de ne pas laisser les résultats dans l’isolement. Ils doivent entrer dans une espèce de confrontation et de rattachement les uns aux autres. Il s’agit de souci d’unité et de lien (relation) excluant toute connaissance fragmentaire et poussant le chercheur à ramener ses résultats à une synthèse, à un ordre et à un système cohérent.

Il faut à présent se demander si ces propriétés essentielles[28] à toute démarche scientifique sont absentes dans le savoir ordinaire. Il faut sans doute répondre par la négative. Ils s’y trouvent en germes et y atteignent parfois une importance réelle et efficiente. Quoi qu’il en soit, ils sont encore trop mêlés aux exigences de la vie pratique et donc ne peuvent parfois pas se développer pleinement. De fait, dans l’existence humaine ordinaire, la connaissance est au service des buts utilitaires de la vie[29]. L’intelligence (ou la connaissance) est mise au service des circonstances perpétuellement variables de la vie, afin de s’y adapter. C’est le subjectivisme et le sentimentalisme qui inspirent pour une large part les jugements.  En outre, les conditions concrètes et changeantes même de l’existence influent sur l’examen des faits.

Il faut pourtant noter que l’individu a la capacité de s’élever au dessus de la vie ordinaire. En d’autres termes, tout en considérant l’existence da sa dimension concrète, réelle « primo vivere », l’esprit humain peut s’établir à un plan supérieur et se fixer sur l’un ou l’autre secteur de la réalité et en faire une étude méthodique et minutieuse afin d’en acquérir une connaissance théorique, scientifiquement établie. En effet, l’avantage d’un tel effort consiste en ce que l’on peut toujours demeurer dans la vérité, et revenir au plan de l’utile, i.e. des problèmes de la vie pratique pour y appliquer les vérités scientifiques[30].

1.2. Sciences et philosophie

Arrivés au niveau de la connaissance scientifique, il faut à présent l’épineuse question de la distinction entre sciences et Philosophie. C’est au fond, la question de la constitution de la connaissance scientifique (quand, comment et quels éléments).

Commençons en disant que même si l’humanité avait déjà un certain degré de civilisation à bien des endroits de l’univers (Indes, Chine, Perse, Asie mineure, Egypte), avec des périodes brillantes, une organisation sociale et politique très supérieure, une éclosion d’une vie artistique et littéraire remarquable, il faut dire que c’est dans le milieu grec que l’esprit scientifique réussit á se déployer avec liberté[31]. Plus haut, nous avons évoqué le caractère de l’élection rationnelle de la Grèce. En effet, dans ce milieu, l’homo sapiens y découvrit la valeur souveraine de la raison. C’est dire que l’activité purement rationnelle de l’esprit (Connaître, comprendre, expliquer) devint un moyen important de progression dans la connaissance de la réalité. Dans le même sens s’entreprit aussi l’étude de la technique formelle de la connaissance (la logique du raisonnement) sans oublier la distinction entre science et application pratique. En effet, c’est cela le « miracle grec » (dont on dit qu’il est à l’origine de la civilisation mondiale) qui s’appuie essentiellement dans l’affirmation éclatante de la supériorité absolue de l’esprit.

« La science, pour les Grecs, est l’explication raisonnée de toutes choses par leurs causes »[32]. Cet entendement se réfère au fait que (i) le monde réel est un « cosmos », i.e. un tout ordonné ; (ii) cet ordre est rationnel, i.e. peut être compris par l’intelligence humaine ; (iii) finalement, il s’agit d’un ordre de causalité, i.e. l’explication de tout événement se trouve dans ses causes. Ce sont ces trois principes qui régissent la science grecque. En d’autres termes, la recherche scientifique par des faits pour remonter jusqu’au sommet de l’échelle des causes. C’est cette conception qu’expose Aristote (385-322) et qui restera en vigueur jusqu'à l’époque moderne.

Pour le Stagirite, c’est de façon graduelle que la raison humaine découvre la réalité. Celle-ci part des caractères sensibles. Par ceux-ci, l’univers matériel se montre à nous. Ensuite, ces caractères sont soumis au mouvement et au temps, aspect qu’aborde la Physique. En faisant par ailleurs « abstraction » du mouvement et du temps afin de ne retenir dans les corps que leur aspect quantitatif, on a alors l’objet des mathématiques. Et si enfin, les choses matérielles considérées dans leur réalité sont des êtres, des substances, alors il faut – pour les saisir – faire appel à la raison et non aux sens (ceux-ci n’atteignent que les qualités dans le temps et l’espace). Cette considération de l’être en tant que tel, nous Fait dégager du sensible, même si la chose en étude demeure sensible. On se trouve ainsi à un stade de la réflexion qui permet d’atteindre et d’englober dans une même étude, outre les choses matérielles, un autre genre de réalités qui comprend l’être divin. C’est l’objet de la philosophie première (appelée plus tard métaphysique). Celle-ci étudie la réalité en tant qu’elle est immatérielle et s’occupe donc des êtres sensibles considérés en tant qu’êtres, i.e. dans leur aspect intelligible et aussi des êtres que les sens ne peuvent percevoir et qui ne sont accessibles qu’à la raison parce que la réalité est immatérielle. C’est ainsi que la philosophie première s’appelle aussi théologie dans la mesure où Dieu en est l’objet principal d’étude. 

C’est dans cette classification (ce corpus de sciences ou philosophie) dont la clé de voûte est la métaphysique ou la philosophie première que chaque science particulière doit trouver sa place dans la mesure où elle contribue à l’intellection de l’univers[33]. Il serait intéressant de rechercher une conception toute nouvelle (actuelle) des sciences,i.e. dans leur détachement avec la philosophie et surtout avec l’influence des sciences de la communication et biotechnologiques.

Sans entrer en profondeur dans cette recherche, l’on doit simplement remarquer qu’au-delà de ce progrès fulgurant et émerveillant des sciences les sciences, ainsi définies, elles ne peuvent pas, cependant, répondre à tous les problèmes existentiels qui se posent à l’être humain et á l’environnement de ce dernier. C’est dire qu’il ya un domaine intellectuel qui ne relève pas d’elles, celui de la philosophie.

Pour confirmer la thèse ainsi énoncée, remarquons tout d’abord l’incapacité des sciences –mathématiques et expérimentales – leurs points de départ. Aussi peut-on se demander avec raison : « Sur quoi reposent les définitions qu’elles postulent et les méthodes qu’elles appliquent avec succès ? Que vaut le travail de la raison en général ? Quel sens faut-il attribuer à une donnée expérimentale ? »[34] Ou encore ces questions qui concernent les conditions absolues du réel : « Quelles sont les conditions du réelles, d’une part, de toute donnée expérimentale sensible et, d’autre part, de l’esprit humain ? En quoi matière et esprit se distinguent-ils et quels sont leurs rapports ? Quelles sont leur origine et leur destinée ? »[35] Comme on peut le remarquer, ces questions nous situent au-delà du simple niveau quantitatif et/ou phénoménal. Et en cela, elles sont du ressort de la philosophie.

Il faut en fait attendre l’époque moderne et même contemporaine pour avoir un contenu de la science ou de la philosophie au sens ancien du mot[36]. Dès lors, on établira une opposition entre la philosophie et les sciences mathématiques et expérimentales. Cette précision heureuse et féconde finit par déboucher sur des principes et méthodes claires évitant ainsi toute confusion. À la philosophie on réservera la solution des problèmes relevant des sciences propres dites. Et ces dernières éviteront toute aventure sur des domaines qui ne sont pas de leur ressort et en même temps s’abstiendront de nier la nécessité de l’opportunité d’une philosophie formellement différente des sciences. 

La philosophie ne peut faire fi de données empiriques dans l’entreprise de ses travaux. En ce sens, le philosophe gardera un contact étroit et permanant avec les sciences et doit tenir compte de leurs résultats. 

Doit-on pour cela conclure que la philosophie est à la merci des sciences et qu’elle subit dans ses œuvres le contrecoup de leurs variations ? Il faut plutôt envisager le problème et aller dans le sens de la complémentarité et de l’interdisciplinarité dans lesquelles se retrouvent toutes les disciplines. Dans ce contexte du pluralisme et du dialogue, l’on doit donc admettre que « les découvertes scientifiques peuvent donner lieu à des problèmes philosophiques nouveaux, à un énoncé plus précis et plus correct de problèmes anciens, ou à l’élimination soit de faux problèmes, soit de questions faussement considérées comme philosophiques, alors qu’elles ressortissent aux sciences »[37].

À leur tour, les sciences ont besoin des progrès philosophiques dans la mesure où l’homme de science a aussi affaire à quelque système philosophique que l’on retrouve de Facon explicite dans des formules du sens commun. Le souhait est que le scientifique prenne conscience de cette adhésion et surtout qu’à la conclusion qu’il fasse une démarcation entre le dérivé de la technique et logique scientifiques et ce qui découle d’une interprétation philosophique plus ou moins inconsciente. D’autre part, la critique philosophique (aux sciences) peut aider le travail scientifique en précisant sa nature et ses limites, sa signification et ses possibilités. Mais aussi, l’on doit arriver à une synthèse de tous les résultats de diverses sciences. Une fois de plus, c’est la collaboration (complémentarité) de toutes les sciences qui est sollicitée étant donné que cette synthèse d’ordre scientifique même si elle aboutir sans se référer  aux principes philosophiques, elle posera tout de même de problèmes philosophiques qui exigent si pas une solution, mais au moins une compréhension si on veut saisir le sens plénier de l’aspect scientifique de l’univers.

1.3. Philosophie et Théologie (chrétienne)

La vie chrétienne se fonde sur des vérités divinement révélées, auxquelles il adhère par un acte de foi. Dans ce sens, la théologie est cette discipline du savoir humain qui formule un discours méthodique et systématique, i.e. scientifique du contenu de la révélation chrétienne. Par rapport aux autres sciences, la théologie se distingue par son caractère « sacré ». C’est dire que son objet n’est pas un fait expérimental, ni une vérité en elle-même évidente. Il s’agit d’ « un donné imposé à la foi de l’homme au nom de l’autorité divine et dont toute la valeur est formellement garantie par le témoignage de Dieu »[38]. C’est donc sur des vérités surnaturelles que porte le discours théologique.

Il faut aussi dire qu’elle participe aussi au processus de complémentarité et d’interdisciplinarité dont a besoin toute science dans le contexte pluraliste actuel. C’est par exemple ainsi qu’elle recourt à l’histoire, la philologie et tout naturellement à la philosophie « pour établir et exposer méthodiquement les vérités révélées et pour les élaborer en système »[39]. Toutefois, ces branches demeurent soumises à l’objet de la théologie et ne peuvent en aucun cas lui ôter son caractère surnaturel.

L’on doit pourtant remarquer que le dépôt de la révélation comporte également des vérités qui sont au-delà des forces de la raison humaine. C’est par exemple le cas des dogmes. Ceux-ci demeureront toujours des « mystères » incompréhensibles à l’homme. Mais la théologie renferme aussi des vérités qui peuvent atteinte par l’intelligence humaine. C’est par exemple le cas de l’existence de Dieu, de la survie après la mort. C’est dire que les deux domaines (révélation surnaturelle et connaissance naturelle) se recouvrent en partie.

Il est clair que l’on entre pas ici dans la problématique épineuse et délicate du rapport entre Théologie et philosophie ou encore entre foi et raison dont Jean Paul II dans sa lettre encyclique Fides et Ratio a présenté une mise au point intéressante[40]. Disons comme pour passer cette problématique à pieds joints que philosophie et théologie « se distinguent radicalement, mais s’unissent harmonieusement dans un ordre hiérarchique, où la théologie a le pas sur la philosophie. L’insuffisance relative de la philosophie, eu égard á l’ordre de la grâce, ne nuit en rien à son caractère absolu et sa pleine valeur dans l’ordre naturel, mais bien au contraire les suppose »[41].

1.4. Définition de la philosophie[42]

- Quelques définitions capables de décourager la soif d’entrer en philosophie

* Henri Bergson (1859-1941) : La philosophie est (comme) un état « semi-divin » où tous les problèmes M. Merleau-Ponty qui « nous mette nt en présence du vide » sont ignorés. Pourquoi existe-je ? Pourquoi y a –t-il quelque plutôt que rien ? Comment puis-je savoir quelque chose ? Toutes ces questions traditionnelles ne sont ici que « pathologiques » á l’exemple du douteur qui ne sait plus s’il a fermé la fenêtre[43]. 

* M. Merleau-Ponty : « (…) philosopher, c’est chercher, c’est impliquer qu’il y a des choses à voir et à dire. Or aujourd’hui, on ne cherche guère. On revient á l’une ou à l’autre des traditions, on la défend. Nos convictions se fondent moins sur des valeurs ou des vérités aperçues que sur les vices ou les erreurs de celles dont nous ne voulons pas »[44].

* le philosophe anglais Francis Bacon (1561-1626) propose aussi une autre définition. Pour lui, la philosophie ne s’occupe pas des impressions premières des individus mais bien des notions abstraites qu’elle compose ou divise selon les lois de la nature et de l’évidence des choses elles-mêmes. Elle est cette partie du savoir qui repose sur la compréhension et a pour objet d’investigation Dieu, la nature et l’homme.

* « La philosophie est le travail d’exprimer par un travail sur le langage, le sens que l’homme accorde à son expérience, à sa condition, à son histoire, à ce monde dans lequel il vit et aux rapports qu’il entretient avec lui »[45].

Ces quelques définitions, au-delà de malgré leurs aspects décourageants, contiennent tout de même une vérité profonde : elles présentent la philosophie comme recherche, investigation, science. C’est dire que la philosophie ne peut jamais être élaborée de façon passive. L’engagement de l’intéressé est requis ; son attention est constamment sollicitée ; sa patience tout le temps éprouvée. Étant tournée vers le monde, l’homme et Dieu, la philosophie convoque l’intelligence humaine à la halte et à la ré-vision de l’histoire, des termes, de la tradition. À ce niveau, nous corrigeons en quelque sorte la mauvaise compréhension de la célèbre phrase de Jaspers –Tout homme est philosophie – (p.202) et on la complète du coup par une autre phrase plus claire et plus exigeante : « La philosophie jaillit de la source originelle du moi et tout homme doit s’y livrer lui-même » (il faut donc un travail laborieux et courageux comme pour fructifier un trésor)[46].

-Recherche à partir de l’« utilité de la philosophie »

* Hegel repris par E. weil :

« Pour dire encore un mot de cette manière de donner des recettes (indiquant) comment le monde doit être, la philosophie en tout cas, arrive toujours trop tard. Pensée du monde, elle n’apparaît qu’à l’époque où la réalité a achevé le procès de sa formation ; et s’est parfaite…Quand la philosophie peint gris sur gris, une forme de la vie a vieilli et elle ne se laisse point rajeunir avec du gris sur gris ; elle se laisse seulement connaître ; l’oiseau de minerve ne prend son vol qu’á la tombée de la nuit »[47].  

*E. Weil :

« Il est vrai, la philosophie n’aide personne à résoudre les difficultés techniques de la vie active ; mais si elle amène les hommes à les regarder et en en comprendre la portée et le sens, elle pourra leur être secourable, au moins en les débarrassant de faux problèmes, d’angoisses puériles ou juvéniles, de rêves tout juste bons á leur fermer l’accès à la réalité, à leur interdire de voir de quoi il s’agit et de mesurer vivants, à ce qui vit… la première tâche de qui veut transformer le monde est de le comprendre dans ce qu’il a de sensé »[48].

 

Ces deux paradigmes définitionnels permettent de nous renseigner sur ce dont il est question dans la démarche qui sera la nôtre tout au long de cette introduction. En effet, « introduire à la philosophie, c’est introduire dans un champ où les termes ont un héritage et une histoire ; où Socrate, Platon, Aristote Descartes, Kant, Hegel, Jonas, etc. ont déjà existé.  Philosopher, c’est donc et dans ces conditions s’insérer dans une tradition qui, elle, comporte de constantes ; c’est voir le présent á la lumière du passé et gérer une osmose vivifiante entre le passé et le présent ».  C’est dire en d’autres termes, qu’en Philosophie penser c’est d’une manière ou d’une autre accueillir l’héritage de la tradition pensante, se laisser instruire par tout ce que les générations antérieures ont vécu et élaboré. L’on ne doit pourtant pas oublier qu’il s’agit d’une tradition á continuer et á interpréter avec les questions existentielles du moment. Et dans ce sens, une philosophie ne digne de ce nom que si elle est capable de transmuer la raison passée en raison pensante présente, recueillant en son sein savoir le meilleur des temps révolus pour le convertir en esprit vivant susceptible d’informer son époque[49].

Ceci nous donne davantage de conviction que la question « qu’est-ce que la philosophie » semble insoluble et la réponse doit encore se faire attendre. Pour ne pas continuer nager dans le flou au fur et á mesure que la spéculation se fait de plus en plus profonde, il faut recourir á l’étymologie du mot « philosophia ».  Peut-être qu’à ce niveau, on pourra comprendre de quoi il est question ici et alors libérer le débutant de ses craintes.

-          La philosophie comme mot[50]

D’origine grecque, le terme « Philosophie » est composé de deux particules essentielles dont chacune exprime une réalité bien précise : le philein (philos comme adjectif) et la sophia (sophos) et signifie respectivement l’amour et la sagesse. Pris donc dans son sens immédiat, le mot signifierait « amour de la sagesse ». Seulement, les deux mots n’ont pas d’explications si évidentes, claires et limpides. Il convient donc de les expliciter et de les approfondir.

+ Philein signifie « aimer d’amitié et avec plaisir ». Il exprime ainsi un désir dont l’autre constitue l’objet de tension, de recherche. Comme tension vers, le Philein est dynamisme, ouverture vers l’autre pour le laisser être autre et trouver son plaisir dans cet être-autre qui me transcende et qui n’est réductible á aucun moyen instrumental. En d’autres termes, le Philein veut dire un penchant et une amitié favorables et durables pour un autre. Dans ce sens, aimer la Sophia consiste à se familiariser avec elle jusqu’à l’acquisition de l’ « habitude » et « presque la dévotion qui, elles excluent des  moments isolés, fussent-ils d’intense activité réflexive », car « une tension permanente vers l’idéal, vers le but envisagé marque l’essence de la philosophie et fondamentalement la caractérise »[51]. 

+ Sophia

Pour comprendre ce concept selon Platon, trois niveaux qui, par ailleurs, vont dans l’ordre croissant sont nécessaires : (i) la simple dextérité, la simple habileté manuelle ; (ii) le « savoir-science » ; (iii) la sagesse pratique dans la vie des affaires. Il faut distinguer le terme des « Sophistes » dont il est apparenté.

Platon, dans plusieurs de ses Dialogues, tente de donner une explication de ce concept.  le Charmide : éprouver de la honte pour certaine opinion (160e) ; s’occuper de ses affaires (161b) ; se connaître soi-même (164e)[52].

Potlitique (258b-262a) : distinction de trois sortes de sciences : les sciences pratiques (éthique, politique et économie) ; les sciences poétiques (l’art, la poésie et la rhétorique) et les sciences théorétiques orientées vers la théorie de la vérité (p.ex. la philosophie).

Une saisie plus approfondie de ce qu’est la sagesse nous est offerte par Aristote. Pour lui, la sagesse se conçoit comme science théorique. En effet, il affirme : « Nous concevons d’abord le sage comme possédant la connaissance de toutes les choses, dans la mesure où cela est possible (…) Ensuite celui qui est capable de connaître les choses difficiles et malaisément accessible à la connaissance humaine (…) En outre, celui qui connaît les causes avec plus d’exactitude et celui qui est plus capable de les enseigner sont, dans toute espèce de science, plus sage (…) »[53].   

On retrouve également chez Aristote un  autre approfondissement de la définition de la philosophie : « une science théorétique », i.e. une science « qui a pour objet le savoir désintéressé » ; ou une « science qui poursuit la science en vue de connaître » ou encore « science qui cherche à savoir pour échapper à l’ignorance » ; ou enfin et au sens strict « recherche d’un savoir radicale et intégral englobant la totalité du réel »[54].

Certains penseurs rapprochent la Sophia au Sapere latin. En effet, le Sapere est « le fait de jouir d’un bon esprit de discernement permettant de savoir ce qu’il faut faire et ce qu’il convient d’éviter, d’être compétent dans un domaine déterminé, non seulement d’en avoir la pleine maîtrise, mais aussi et surtout de pouvoir savourer et exprimer ce que l’on sait parce que l’on en détient une connaissance parfaite »[55].  Comme on peut le remarquer, cette conception de la Sapere allie l’irréprochabilité de la conduite á l’acquisition des connaissances des choses spirituelles et matérielles (autorité morale, probité, savoir et savoir-faire). Dans ce sens, être philosophe, c’est encore ne pas se contenter des idées reçues, défendre l’esprit de libre examen, c’est être par principe favorable á l’explication des phénomènes par des causes naturelles hostiles aux dogmes et la contrainte. 

L’approche étymologique nous permet de dire plus ou moins ce qu’est la philosophie et ce que peut signifier être philosophe. L’essence de la philosophie consiste dans la recherche permanente de la vérité et non sa possession. Dans ce sens, le philosophe s’oppose au Sophos, i.e. à celui qui se nomme soi-même sage et croit ainsi posséder la vérité. Le philosophe est et reste un « amoureux du savoir et de la sagesse ».

Platon, dans certains de ses dialogues, aborde aussi ce sens de la philosophie. En effet, la philosophie est la recherche et la poursuite de la sagesse[56] ; elle est l’étude et la recherche zélée de la sagesse-science[57].

Approfondissement de la définition étymologique 

De ce qui précède, on peut á présent clarifier certains points restés dans l’ombre tout au long de notre questionnement et de notre étonnement.

Ce que la philosophie n’est pas :

-          à confondre avec une manière de vivre (vivre distrait, ou en ascète, pleins d’interdits et de tabous de toutes sortes pour discipliner les passions de la chair et orienter les tribulations de l’esprit[58] ;

-          une technique du comportement qui viserait quelque révélation (Yoga, zen, etc.) ou une vie orientée selon les exigences déterminées par un maître[59] ;

-          nune « idéologie », même si certaines idéologies se proclament « philosophies particulières et authentiques »[60].

De ces négations ou dénégations, il sied de reconnaître positivement que :

-          la philosophie est marquée par un caractère essentiellement rationnel (Cf. Les mots « recherche », « sagesse », « savoir », « science », etc.)

-          la philosophie est explicite. L’on peut affirmer le philosophe jésuite Paul Gilbert, ce qui est découvert dans la mentalité diffuse n’est pas philosophie ; mais la découverte elle-même peut être philosophique[61] ;

-          la philosophie intègre de manière constitutive l’explicitation des présupposés implicites que son discours met en œuvre[62].

Disons pour nous résumer que la philosophie est rationnelle, explicite et réflexive sur elle-même. Elle est recherche des premières causes et des premiers principes. Cette recherche la conduit à devenir un système de connaissances naturelles méthodiquement acquises et ordonnées, capables d’expliquer toutes choses par leurs raisons fondamentales. Par ailleurs, cette recherche est libre et responsable et s’oriente sur le sens de l’existant.

Conclusion : Philosophie, quid ?

La philosophie procède avec méthode et ramène les résultats obtenus à un ordre systématique. Ceci lui donne un caractère vraiment scientifique (au sens général) qui le différencie du coup du savoir ordinaire, de la théologie des mathématiques et des sciences empiriques.

En tant que telle (par définition), la philosophie se cantonne  dans l’ordre naturel et ne fait usage que des facultés naturelles de connaître (par exemple, distinction avec la théologie basée sur la révélation et la foi).

Son objet matériel (i.e. tout ce qui tombe sous sa juridiction) c’est le tout (la totalité du réel). C’est ce que les philosophes recherchent. Dans la recherche à travers cet objet, la philosophie propose une synthèse qu’elle projette d’établir et qui englobe toutes choses, sans exception. Par ailleurs, au-delà du nombre infini de ces choses, disons que ce qui touche la philosophie, la touche en tant qu’ « existant ». Avec la totalité du réel, la philosophie s’oppose ainsi aux sciences particulières qui s’occupent chacune d’une classe déterminée d’objets. Ceci souligne le caractère universel de la philosophie, du fait qu’elle étudie l’universalité des êtres.

Cependant, comme toute science, une manière précise de définir la philosophie, est son objet formel, i.e., le point de vue sous lequel elle considère son objet matériel. La recherche philosophique vise la raison fondamentale (RF) des choses. En philosophie, la RF est une explication qui doit, tout d’abord, pouvoir pleinement se justifier par elle-même jusqu’en ses fondements de sorte qu’elle ne repose sur aucun postulat, ni sur aucun principe qui, à son tour, demanderait d’être étayé par des preuves ; elle tient tout entière par elle-même, en vertu de sa propre valeur.

Ainsi compris, l’objet formel de la philosophie manifeste son indépendance essentielle et son autosuffisance. Et la philosophie se doit de rechercher ses raisons explicatives dans un domaine qui diffère formellement de celui des sciences sous peine de ne plus présenter une couleur différente.

Les raisons philosophiques ne sont donc pas expérimentales, mais mét(a)empiriques. Dans ce sens, elles demeurent transcendantes par rapport au domaine de l’expérimentable, elles ne comportent pas d’éléments qui soient homogènes aux domaines empiriques. Les raisons philosophiques, dans la mesure où elles doivent se justifier par elles-mêmes et être vraiment fondamentales, peuvent aussi, le cas échéant, fournir une justification foncièrement suffisante des présupposés scientifiques. Ce faisant, par rapport aux autres sciences, la philosophie peut constituer un « au-delà » de la pensée scientifique.

Toutefois, il y a des questions auxquelles l’on doit impérativement répondre : « Quelle est d’une façon précise, ce domaine des raisons philosophiques ? Y avons-nous accès et jusqu’à quel point ?»[63] Ces questions qui restent insolubles entièrement dans un cours d’introduction ne peuvent que jeter des postulats, car « C’est à la philosophie et à elle seule, qu’il appartient de soulever et d’étudier ces problèmes »[64].

Pour le moment ne peut pas être à même de découvrir la raison fondamentale d’-aucune chose. Mais il reste essentiel pour la philosophie de pouvoir s’engager dans la recherche, même si les problèmes resteront insolubles et surtout les résultats restent également incertains.

Comme dit plus haut, la philosophie cherche les dernières causes (objet formel) alors que les sciences, quant à elles, poursuivent les causes prochaines. C’est dire qu’une explication philosophique ne peut se trouver que dans l’ordre de la « causalité ». 

L’on doit pourtant accepter que dans l’approche de l’objet formel de la philosophie et des sciences, il n’y a aucune homogénéité. L’objet de la philosophie est irréductible à celui des sciences. Il existe donc une distinction entre l’objet formel des sciences et celui de la philosophie.

 

 

 

 

2.      INTRODUCTION À LA PROBLÉMATIQUE DE LA PHILOSOPHIE[65]

 

Comme nous l’avons vu dans le premier point, à l’époque des balbutiements, le savoir était indifférencié. Tout était objet de recherche philosophique (les êtres divins, les astres, les objets mathématiques, les êtres naturels, etc.). C’est à partir du questionnement général sur l’être « qu’est-ce que l’être ? » que les sciences telles que nous les connaissons aujourd’hui se sont constituées. Et l’examen réitéré de cette question a pu définir des sciences particulières qui étudient les parties spécifiques de l’être. Les sciences actuelles n’existent pas depuis toujours. La séparation entre la philosophie et les sciences existent depuis le XVIè s. de notre ère. Au début, toutes les sciences étaient identiques[66]. Aujourd’hui, alors que chacune des sciences (biologie, physique, psychologie, etc.) étudie un aspect déterminé de l’être (le vivant, le mouvement, la conscience, …), la philosophie s’intéresse toujours au tout ; elle étudie les notions de base et les principes sur lesquels se fonde chacune des sciences particulières. Ainsi peut-on distinguer en philosophie différents champs d’intérêts. Nous répartissons en quatre grands problèmes l’objet d’étude des philosophes. L’ensemble des solutions de ces problèmes constitue un mode spécifique d’explication du réel qui, tout en entretenant les rapports avec les sciences, diffère tout de même du discours scientifique.

Tableau 1 : Problèmes philosophiques et disciplines correspondantes

 

Le problème de la nature
La physique ou la philosophie de la nature
Le problème de la connaissance
(i)                 L’épistémologie ou la théorie de la connaissance ; (ii) la logique ; (iii) la méthodologie des sciences
Le problème de l’être
(i)                 La métaphysique, (ii) l’ontologie
Le problème du bien
La philosophie pratique : l’éthique, la politique

 

 

1.      Le problème de la nature

Les tout premiers philosophes étaient des physiciens. La nature était leur objet d’étude. Ils se sont d’abord interrogés sur ce qu’ils pouvaient percevoir directement avec leurs sens, i.e. des êtres sensibles. Dans ce sens, à l’époque, la physique était vue d’une manière plus large qu’aujourd’hui. Elle comprenait l’étude de différents aspects des êtres ayant une matière. Actuellement, plusieurs sciences différentes (anatomie, biologie, zoologie, astronomie, physique, psychologie, etc.) s’occupent chacune de l’un de ces aspects.

La première constatation des philosophes de la nature a porté sur ce fait d’expérience que toutes les choses de notre monde subissent continuellement le changement : Tout ne cesse de changer, tout passe[67].

En effet, l’on peut facilement comprendre cela aujourd’hui dans la mesure où nous savons que toutes les choses ou tous les êtres de notre monde ont une matière et que, par définition, aucune matière ne reste éternellement identique. Ainsi ce qui vit meurt ; de la saison sèche, nous passons à la pluie. Ce qui est froid devient chaud. Même les sentiments se transforment.

Néanmoins, le mouvement est apparu aux premiers philosophes comme ce qu’il y avait de plus manifeste dans la nature, et a ainsi constitué le centre de leurs spéculations. Cependant, cette constatation (tout change) est vite apparue comme une insuffisance pour rendre compte des êtres de la nature. Si le mouvement était la seule raison explicative des êtres sensibles, se sont dit les philosophes, il serait impossible de les étudier de façon sérieuse puisque rien n’étant jamais pareil, tout ne serait que non-sens. En effet, s’il n’y avait pas de lois ni de principes qui régissent les changements et fondent notre savoir, la science serait impossible et nous ne pourrions acquérir aucune connaissance. Cela contredit aussi toutes les régularités que, malgré le changement, nous pouvons observer dans la nature : trajectoires du soleil, de la lune et des planètes, cycle des saisons, conservation des espèces. Les philosophes ont donc pensé que quelque chose, malgré le changement continuel, restait toujours identique. Ainsi, l’étude du mouvement s’est alors transformée en une recherche de ce qui est permanant et qui, logiquement, devrait expliquer l’être réel des choses.

Parmi les disciplines qui s’occupent de ce groupe de problèmes, il y a d’abord la philosophie de la nature. Elle explicite la constitution fondamentale des êtres particuliers qui composent l’univers. Elle nous montre ainsi que la nature comprend des êtres divers et variés : de la matière minérale et des individus vivants, doués ou non de vie consciente. La cosmologie, la biologie de la philosophie et la psychologie se partagent l’étude des êtres. Cette dernière discipline sera en ordre principal, une anthropologie philosophique, ayant pour objet l’étude de l’homme.  

Voilà comment, à partir de cette recherche, naîtra deux autres problèmes : celui de la connaissance et de l’être.

2.      Le problème de la connaissance

Les théories élaborées avec les premiers philosophes sont apparues, avec le temps, imparfaites et contradictoires. D’autres philosophes ont donc pris du recul et ont fait porter leur réflexion sur les conditions de la science. Ils ont compris que l’élaboration des théories conformes à la réalité exige l’interrogation du pouvoir et des limites des facultés humaines. En effet, les êtres humains ne sont pas comme les autres espèces animales réduits à la simple connaissance des choses qui font partie de leur entourage immédiat. Cependant, ils n’ont pas non plus une intelligence aussi parfaite que celle des dieux. Ils ont la capacité d’édifier les sciences mais, pour cela, il faut respecter certains critères qui fondent la vérité de ce que l’on soutient. Pour ne pas prendre pour des vérités les chimères de notre esprit ou les connaissances qui ne sont que vraisemblables, il faut s’appliquer à différencier ce qui est objectif de ce qui est subjectif.

Ces philosophes nous ont appris à éviter que nous ne devons pas prendre pour des faits tout ce que nous présentent nos perceptions sensibles. Car il n’existe pas de lien nécessaire entre notre expérience subjective et immédiate des choses et la réalité objective. L’on a, par exemple, tendance à croire que les couleurs sont des qualités propres aux choses (qu’elles sont objectives) ; pourtant, elles ne sont en réalité que l’effet, sur nos yeux, de la lumière à la surface des choses (elles sont subjectives). Il en est de même de multiples illusions d’optique qui peuvent affecter notre regard, et des erreurs de jugement que nous pouvons commettre sous l’influence de l’opinion publique. Il est évident que dans la vie de tous les jours, l’on n’a pas besoin d’utiliser à tout moment une approche scientifique pour agir. Cependant, l’on doit être conscient que, lorsqu’on fait face à un problème, la recherche de la vérité implique un dépassement de l’expérience quotidienne. En nous incitant à la prudence, par opposition à la précipitation et à l’ignorance, le doute s’avère à ce niveau le premier pas vers la connaissance et la science.

Revenons aux disciplines qui s’occupent de ce groupe de problèmes. Quand on considère la connaissance humaine, dans sa fonction de connaissance, i.e. que l’on veut d’abord savoir quelle est la portée fondamentale et quelles en sont les conditions essentielles, on se tourne alors vers l’épistémologie[68]. Étant donné que la connaissance comprend des éléments différents, concrets et abstraits, il revient alors à la critique de s’efforcer d’en fixer le sens véritable et la valeur exacte. Les philosophes ont tenté d’établir des règles à suivre pour construire des raisonnements corrects. Ils se sont aussi penchés sur la logique interne du discours, i.e. sur la force des liens qui unissent les différentes propositions à l’intérieur du discours[69]. La détermination des lois formelles qui règlent l’usage correct de la raison discursive revient à la logique formelle et à la logistique.

L’on doit également noter que l’activité de la raison ne fonctionne pas dans le vide. Elle s’exerce sur des données –une matière- auxquelles elle doit s’adapter. La critique des sciences (aujourd’hui Méthodologie des sciences) étudie la connaissance à ce point de vue. Elle s’attache à déterminer la valeur et la portée des principes et des procédés d’investigation, d’explication et de systématisation mis en œuvre par les différentes sciences.

3.      Le problème de l’être

Le problème de la connaissance, nous a laissé remarquer entre autres qu’il y a un écart entre le réel positif (ce qui est véritablement) et la connaissance que l’on peut en avoir. Aussi est-il nécessaire de se questionner sur l’être lui-même.

Il est vrai que les philosophes de la nature étudiaient déjà l’être en tant qu’il est doté de matière et caractérisé par le changement. Toutefois, l’interrogation de ceux qui ont poussé plus loin la recherche est plus fondamentale. Avec eux, l’être est considéré dans son sens le plus général et absolu : on parle d’ontologie. Celle-ci étudie l’être en tant qu’être. L’être est pris au point de vue transcendantal. Dans ce sens, « l’ontologie recherche ce qui est absolument requis pour que la multitude des êtres ̎soient ̎, i.e. pour qu’ils puissent appartenir à

 

l’ordre suprême et unique, l’ordre de l’être »[70]. C’est dire que l’ontologie ne s’applique pas aux différents vivants que l’on rencontre dans la nature (un homme, un ours, une plante) ni aux différentes sortes d’êtres inanimés (une maison, un livre, un Handy). Ce qui l’intéresse, ce que toutes ces choses si différentes ont en commun : le fait d’être. Ainsi l’ontologie se pose la question suivante : « qu’est-ce que l’être ? »[71] L’ontologie s’achève donc sous forme de philosophie de Dieu, appelée également Théodicée (théologie naturelle ou philosophique).

Une autre discipline qui s’intéresse au problème de l’être est la métaphysique, appelée aussi philosophie première. En tant que recherche générale sur les causes premières de l’être, elle étudie aussi les raisons générales qui expliquent réellement les êtres. C’est ainsi qu’elle porte sur des questions qui vont au-delà de l’enquête sur les êtres de la nature. Parfois, elle se confond avec la théologie (étude rationnelle des questions religieuses et selon laquelle l’être au sens absolu est Dieu[72].

Par rapport aux causes, jusqu’au XVI è s., les philosophes considéraient, pour la plupart, qu’il y avait quatre causes premières de l’être. Les tout premiers philosophes connaissaient déjà deux d’entre elles. 

La cause matérielle. C’est ce dont une chose est faite. Le substrat à partir duquel un être est engendré et qui demeure en lui comme un élément de sa composition. Pour connaître la cause matérielle d’une chose, l’on pose la question : « De quoi cette chose est-elle faite ? »

La cause efficiente (du mouvement). Ce qui fait qu’une chose acquiert l’existence, de même que les changements qu’elle subit tout au long de son existence. Pour comprendre le mouvement, on pose la question : « Comment ?»[73]

La troisième cause a été ajoutée par Platon

La cause formelle ou l’essence. Ce qui fait qu’un être est toujours le même. Ce qui est permanant dans l’être. L’obtention de la définition essentielle d’un être se réalise en posant la question : « Qu’est-ce qu’est essentiellement cet être malgré les changements qu’il peut subir tout au long de son existence ? »[74]. L’essence a aussi comme rôle de rattacher un être singulier à un ensemble (un genre ou une espèce)[75]. C’est l’universel en lui. L’essence correspond donc à un type particulier de concept. 

Enfin Aristote a découvert une quatrième cause.

La cause finale. C’est vers quoi tend un être, le but de son existence, le bien qu’il vise. La fin que vise un être est toujours extérieure à lui et plus parfaite que lui. Pour connaître la fin d’une chose, on pose la question : « pourquoi ?»[76]

Une hiérarchie a voulu être vue parmi les causes premières, c’est-à-dire déceler celle qui était la plus importante que les autres. Dans ce but, les métaphysiciens ont fait l’hypothèse de l’existence d’un être parfait et ils se sont demandés si l’explication rationnelle de cet être nécessitait la contribution des quatre causes. Leur conclusion était que cet être étant parfait, il resterait éternellement identique à lui-même, puisqu’il ne pourrait se détruire ni se parfaire davantage ; il n’aurait donc ni mouvement ni finalité. Il n’aurait non plus de matière (toute matière change). Ainsi, ce serait une essence pure. Tout compte fait, l’essence est apparue comme la cause véritablement première. C’est pourquoi la métaphysique s’intéresse d’abord à l’essence et à

 

ce qui est immatériel (la physique aux êtres matériels et changeants).

4.      Le problème du bien et des valeurs

Les différentes recherches des philosophes ont conduit ceux-ci à étendre leur réflexion sur l’être humain lui-même et sur les attributs d’une conduite que l’on pourrait qualifier de « bonne ». Ainsi sommes-nous dans la branche philosophique que l’on nomme philosophie pratique, i.e. qui porte sur les affaires proprement humaines. En effet, elle diffère des autres disciplines philosophiques en ce qu’elle ne vise pas uniquement un savoir théorique, mais aussi un savoir-faire. Elle ne vise pas la connaissance des choses qui sont extérieures, mais plutôt, au moyen de l’action, la perfection de l’être humain dans toute sa personne. En ce sens, elle est plus exigeante que les autres branches de la philosophie. La philosophie pratique se divise elle-même en deux parties étroitement liées : l’éthique et la politique (certains ajoutent une troisième la philosophie de l’art).

L’éthique concerne tout ce qui touche la conduite de l’individu. Elle fait appel à la conscience personnelle du bien et du mal, sans laquelle l’être humain ne peut exercer son libre arbitre et est condamné à suivre ce que la nature lui dicte ou ce que lui a inculqué l’habitude. C’est ainsi que l’on distingue souvent l’éthique de la morale.

La morale invite souvent á agir selon les valeurs dont on n’a pas décidé soi-même (un code religieux) ; alors que l’éthique pousse à être autonomes (Kant va dire à partir d’une loi inscrite en nous-mêmes, l’autonomie : l’impératif catégorique).  L’éthique se fonde sur notre sens critique à l’égard des valeurs établies et sur l’examen continuel de nous-mêmes. Elle exige que, lorsque la raison nous fait découvrir une règle de conduite qu’elle juge bonne, nous respections cette règle dans l’action.

Dans la visée de l’ensemble de biens par l’individu, l’éthique tente d’établir un ordre hiérarchique des valeurs[77].

L’éthique tente de définir les différentes vertus ou différentes dispositions de caractère qui nous portent à agir selon le bien (par exemple, la justice, le courage, la tempérance et la prudence sont des vertus). Dans ce sens, elle recherche les critères qui font qu’une action sera dite vertueuse ou moralement bonne. L’action vertueuse est-elle une action accomplie par bonne intention ou une action dont le résultat est positif (les deux). L’éthique s’intéresse aussi à déterminer si l’action dépend d’un choix individuel ou de déterminismes extérieures. Enfin, elle cherche les rôles respectifs de la raison et des passions dans l’action humaine. 

La politique concerne tout ce qui touche les décisions des gouvernants et la conduite des citoyens. Elle tente d’établir une valeur dont dépendraient toutes les autres (p.ex., l’égalité, la sécurité, la liberté individuelle, la solidarité) afin que les relations entre citoyens soient harmonieuses. La politique tente de déterminer quelle serait l’organisation politique la meilleure. Elle évalue aussi les forces et les faiblesses de différentes constitutions et vise à déterminer ce que serait un projet véritablement démocratique.

Le but principal est de réaliser le bien commun tout en respectant les libertés individuelles. En ce sens, elle doit chercher á établir un équilibre entre les droits individuels et les devoirs des citoyens. Au-delà des lois (qui peuvent ne pas être justes), elle tente de définir ce qu’est la justice comme vertu.

La philosophie de l’art peut se comprendre dans ce domaine pratique, dans la mesure où, en tant que discipline philosophique, elle se consacre à l’étude de l’œuvre humaine. Le secteur est riche, car l’homme exerce beaucoup d’œuvres d’art : arts mécaniques, arts libéraux, beaux arts. Et les arts s’appuient sur des nombres scientifiques et requièrent un fondement philosophique : donc il faut faire une étude philosophique de la technique et une étude de beaux arts ; il faut faire la philosophie de l’éducation, du droit et de la politique.

L’étude sur les valeurs constitue de manière générale la philosophie de la culture ; i.e. l’étude philosophique de l’ordre des valeurs introduites dans la nature par l’activité formellement humaine, individuelle, sociale. 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] Cf. NKERAMIHIGO ; Th., Initiation à l’acte philosophique. Introduction à la philosophie, Kinshasa, Ed. Loyola (Publications Canisius), 1991, p. 10 : « La nature philosophique de la question, que doit poser l’introduction à la philosophie, exclut ainsi un discours objectif sur la philosophie. Elle impose par nécessité essentielle de parler de la philosophie en philosophant » (...)  En prenant conscience que la philosophie est une science qui, de soi, ne laisse rien en dehors d’elle-même parce qu’elle porte sur le tout de l’être, nous venons de reconnaitre que l’initiation à la philosophie ne saurait être extérieure á la philosophie sans instaurer un discours objectivant sur elle. Au contraire, de par le caractère englobant de la philosophie et de par la nature de la question qu’elle pose, l’initiation à la philosophie est, de nécessité essentielle, philosophique ». Un peu plus loin, le philosophe rwandais cite les mots K. Jaspers pour justifier ses thèses : « on n’apprend pas la philosophie, on apprend à philosopher ». 
[2] Ibidem, p. 11.
[3] Ibidem. La citation à l’intérieur est de Martin Heidegger, dans son ouvrage, Qu’est-ce que la philosophie ?, trad. Kostas Axalos et Jean Beaufret, Paris, Gallimard, 1957, p. 11.
[4] Cf. Ibidem. La réponse à la question « Qu’est-ce que la philosophie » devient comme le point cardinal d’une introduction à la philosophie (l’objectif du cours). Quant à la direction historique, l’auteur l’éclaire davantage dans les pages 11-22.
[5] Cf. Dirven, E., Introduction à la logique, p. 8.
[6] Cf. BREHIER, E., Cité par NKERAMIHIGO, T., Op. Cit., p. 14-15. Selon cet auteur, le véritable historien de la philosophie se situe au troisième niveau.
[7] Voir la réponse que donne Nkeramihigo, Op. cit., p. 15-16.
[8] Cf. DIRVEN, E., Op. cit., p. 8-9.
[9] Quand il s’exprime ainsi l’homme de la rue se représente d’une part un être étrange dont la pensée ou l’agir est le plus souvent soit subtil qu’il peut justifier n’importe quel comportement soit si flou et si compliqué que l’on ne peut et doit s’en approcher qu’avec « crainte et tremblement », respect et vénération. D’autre part, l’on tente, par l’expression, d’excuser les maladresses et les égarements pratiques du philosophe en faisant de lui un être tellement éloigné de la réalité de la vie que l’on ne devrait pas trop en tenir rigueur ni lui en vouloir d’ignorer certaines réalités pratiques de l’existence des hommes encore en pèlerinage sur cette terre. L’évidence est que, dans l’un ou l’autre cas, le philosophe est et demeure un être étrange et étranger.
[10] Maurice Merleau-Ponty (1908-1961) dans son ouvrage Éloge de la philosophie l’exprime ainsi : « Le philosophe moderne est souvent un fonctionnaire, toujours un écrivain (…) Sans les livres, une certaine agilité de la communication aurait été impossible, et il n’y a rien à dire contre eux. Mais ils ne sont enfin que des paroles plus cohérentes. Or la philosophie mise en livres a cessé d’interpeller les hommes. Ce qu’il y a d’insolite et presque d’insupportable en elle s’est caché dans la vie décente des grands systèmes (L’ « immunité littéraire ». Éloge de la philosophie, p. 48.
[11] Cf. Ibidem, p. 61: « La philosophie nous éveille à ce que l’existence du monde et de la nôtre ont de problématique en soi, à tel point que nous soyons à jamais guéris de chercher, comme disait Bergson, une solution dans le cahier du maître ». 
[12] Cf. Ibidem, p. 11: « Ce qui fait le philosophe, c’est le mouvement qui reconduit sans cesse du savoir à l’ignorance, de l’ignorance au savoir, et une sorte de repos dans ce mouvement ». Karl Jaspers exprime aussi une pensée similaire dans son ouvrage Introduction à la philosophie
[13] À ce propos Merleau-Ponty écrit: « Ce qui fait le philosophe, c’est le mouvement qui reconduit sans cesse du savoir à l’ignorance, de l’ignorance au savoir, et une sorte de repos dans ce mouvement ». Éloge de la philosophie, p. 11. Jaspers abonde aussi dans le même sens: « Si quelqu’un pense voir clair en tout, ce qu’il a cessé de philosopher ». Introduction à la philosophie, p. 175.  
[14] « Personne n’échappe à la philosophie » (…) « Les philosophies et les philosophes se contredisent encore aujourd’hui. Mais il n’y a pas d’autre alternative à la philosophie. Les grandes questions de la philosophie sont en même temps les questions de l’homme, ce problème ambulant, et les philosophies agissent dans l’histoire comme une dynamite, elles causent des changements, des ruptures, des révolutions ». JASPERS, K., Introduction à la philosophie, p.
[15] Jaspers affirme que « seuls les enfants et les fous disent la vérité ». Avec cette thèse, il faut ainsi penser qu’avec l’âge, l’être adulte entre progressivement dans le cachot des conventions et des conceptions, des dérobades (Verdeckungen) et des réserves et perd par le fait même la liberté propre de l’enfant . Par contre chez l’enfant et le fou, l’on assiste à un phénomène étrange : c’est comme si les chaines du camouflage général éclatait afin de laisser jaillir la vérité. Introduction à la philosophie, p. 8 ss. L’on se trouve ainsi face à un étonnement (début de la philosophie) devant le mystère d’être soi-même et pas un autre, devant l’infini des questions existentielles, devant l’existence elle-même, devant le vertige et l’angoisse face á l’être fluctuant et passager de l’homme et des choses.
[16] « La seule question que l’on devrait se poser consisterait á savoir si cette philosophie est consciente ou non, si elle est bonne ou mauvaise, floue ou claire, limpide. Celui qui refuse une philosophie accomplit á son tour une philosophie sans le savoir ».  JASPERS, K., Introduction à la philosophie,
[17] L’expression est de Louis Raeymaeker dans un ouvrage très ancien, mais qui garde encore son actualité sur plusieurs points. Introduction à la philosophie, Éditions Universitaires, Bruxelles, 1944, p. 8.
[18] « La locution rebattue de „Philosophie occidentale“, européenne“ est en vérité une tautologie. Pourquoi ? Parce que la philosophie est grecque dans son être même grec veut dire ceci : la philosophie est, dans son être originel, de telle nature que c’est d’abord le monde grec et seulement lui qu’elle a saisi en le réclamant pour se déployer, elle est relayée par des représentations relevant du christianisme (époque de son règne moderne et européen) » (…) « L’affirmation la philosophie est grecque dans son être propre ne dit rien d’autre que : l’Occident et l’Europe sont, et eux seuls, dans ce qu’il a de plus intérieur leur démarche historique et originellement philosophiques. C’est ce qu’attestent la naissance et la domination des sciences. C’est parce qu’elles prennent source dans ce qu’a de plus intérieur la marche historique de l’Occident européen, entendons le cheminement philosophique, c’est pour cela qu’elles sont aujourd’hui en état de donner à l’histoire de l’homme sur toute la terre l’empreinte spécifique » (…) « même la manière de poser la question est grecque : comment, qu’est-ce que, ti esein ! » Qu’est-ce que la philosophie ? , p. 10-18.   
[19] Cf. DIRVEN, E., Op. Cit., p. 9.
[20] Pour ce point, nous suivons pas à pas l’ouvrage déjà cité de Louis Raeymaerker. 
[21] L’on peut ainsi comprendre la prégnance et l’influence du milieu sur chaque être humain étant que dans la croissance et le développement nos premiers contacts et soutiens proviennent de notre milieu, de notre peuple, de notre culture. Toute vie humaine passe par une société concrète (socialisation) et un enseignement
[22] www. Harrystaut.fr
[23] L’homo sapiens développe cet esprit critique, quand il procède dans sa vie et son agir avec prudence et discrétion ; quand il ne croit pas aveuglement à tout se qui se présente face à lui ni se fie aux apparences ; quand il se méfie de la première impression et évite de se laisser aveugler par l’intérêt ou la passion ; quand il développe un jugement impartial et pratique continuellement un examen consciencieux.
[24] Cf. RAEYMAEKER, L., Op. Cit., p. 6.
[25] Le privilège accordé á la catégorie qualitative montre en fait que dans la recherche de la connaissance, on élève davantage le coefficient de vérité des connaissances pour les établir par après avec certitude.
[26] RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 7 : « la science est centrée sur le vrai et non sur l’utile ».
[27] Ibidem. « Ce souci de méthode s’accompagne d’un esprit critique toujours en éveil. Il faut établir la valeur de la méthode et de ses principes ; ne l’appliquer qu’à bon escient, vérifier et discuter les circonstances, et procéder aux corrections, s’il y a lieu ».
[28] « Objectivité et désintéressement, esprit critique et souci de méthode, essai de systématisation, telles sont les propriétés essentielles de la science dans sa poursuite de la vérité et de la certitude ». Ibidem.
[29] Ici se vérifie l’adage selon lequel « Intelligentia, ancilla vitae ».
[30] Ici, on peut se référer à notre conférence « La théorie éthique de Hans Jonas. Entre rationalité théorique et rationalité pratique » donnée au Cercle de Philosophie Pratique (CEPHIPRA) de la Faculté de Philosophie de l’Université Catholique du Congo (UCC). Tout en partant de Hans Jonas, l’arrière fond argumentatif de cette conférence n’était rien d’autre que la réalité africaine (surtout congolaise) dans laquelle se trouve, de façon saignante et criante (selon nous), cet écart de rationalité. Alors pour faire face à cette réalité tragique, nous proposons ce juste milieu entre les deux rationalités. Il est évident que la réflexion doit encore s’approfondir pour atteindre pleinement cette finalité.   
[31] En effet, au-delà de ces efforts d’engagement dans des voies scientifiques, ces peuples demeurent enrobés dans l’utilitarisme et l’empirisme du savoir ordinaire des hommes et ne se haussent guère au plan de la recherche objective (rationnelle), désintéressée et méthodique (penser à l’arithmétique égyptienne).  
[32] RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 9.
[33] Note sur l’indépendance et le caractère abstrait des mathématiques. Dans cette Antiquité grecque, les math. occupent une place spéciale et ses connexions avec les autres sciences ne s’aperçoivent que malaisément. Si la physique et la métaphysique étudient, chacune à son point de vue, la réalité des choses, les math. quant à  elles, s’occupent formellement de la quantité qu’après l’avoir abstraite de son objet réel. En effet, les notions mathématiques fondamentales sont maniées sans que l’on tienne compte de leurs rapports avec la réalité. C’est dire que de soi, les math ne sont pas tournées vers l’explication réelle des choses. Elles s’accommodent du fictif tout aussi du réel. C’est ainsi que dans leur repli sur elles-mêmes, les math. ont mené une existence indépendante qui leur a fait atteindre dès l’Antiquité, un degré de perfection remarquable grâce à la méthode déductive (caractère déductif). Les math sont ainsi intelligibles, i.e régies par uniquement par l’inéluctable nécessité rationnelle et affranchies, autant que faire se peut, des contingences de l’expérience. Outre les math, il y a aussi d’autres sciences dans cette Antiquité qui ont voulu essayer de se détacher de l’ensemble.  Tel est le cas, par exemple, de l’astronomie, de la mécanique et des sciences naturelles). Ce mouvement vers l’autonomie reprit á la fin du Moyen âge et se poursuivit jusqu’à nos jours. Cf. Ibidem, pp. 11-12.
[34] RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 15.
[35] Ibidem, p. 16.
[36] Anciennement, la philosophie (en tant que science de tout) est un système de connaissances méthodiquement acquises fournissant l’explication raisonnée de l’univers.
[37] RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 17. On peut ainsi comprendre la naissance de nouvelles disciplines au sein même de la philosophique comme la philosophie de la technique (technologie/technoscience), la philosophie biologique, l’éthique écologique, animale, etc. C’est donc aussi dans le souci de dialoguer avec les autres sciences afin de fructifier davantage la complémentarité et l’interdisciplinarité au sein du pluralisme mondial et scientifique actuel.
[38] RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 18.  
[39] Ibidem.
[40] Cf. JEAN PAUL II, Fides et Ratio. Lettre Encyclique sur les rapports entre la Foi et la Raison du 14 septembre 1998, Kinshasa, Mediaspaul, 1998
[41] RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 24.
[42] Nous suivons ici le cours d’introduction á la philosophie de Ntima.
[43] MERLEAU-PONTY, M., Op. Cit., p. 20.
[44] Ibidem, p. 57.
[45] NOIRAY, A., « Historique. L’idée de la philosophie depuis Hegel », in Collectif, La philosophie, Lille, 1969, p. 214.  
[46] JASPERS, K., Op. Cit., p. 3, 167, 202-3.
[47] WEIL, E., Hegel et l’État. Cinq conférences, Paris, Vrin, 1974, 104.  M. Merleau-Ponty abonde aussi dans le même sens, quand il affirme que le philosophe est l’homme qui s’éveille et qui parle, et l’homme qui contient silencieusement les paradoxes de la philosophie, parce que pour être tout-à-fait homme il faut être un peu plus et un peu moins qu’homme.
[48] WEIL, E., Philosophie politique, Paris, Vrin, 1984, p. 11. 59). 
[49] Cf. GUIBAL, F., „Dimension du pensée hégélien », Cité par Ntima, p. 8.
[50] Les termes philosophia, philosophos, ne sont pas chez Homère, ni chez Hésiode. Chez ces eux, le terme Sophia signifie indistinctement sagesse et habilité. Hérodote emploie le terme philosophein pour désigner la culture de l’esprit, l’exercice d’un effort pour acquérir des connaissances nouvelles. Il rapporte que Cresus dit à Solon : « J’ai entendu que tu avais parcouru beaucoup de pays en philosophe (…) pour les observer » (Hist. I, 30). Ce sens général du mot se retrouve aussi chez d’autres auteurs comme Thucidide (Guerre du Péloponèse, II, 40) et Isocrate (Panégyrique d’Athènes, I). D’après Cicéron, c’est Pythagore () qui aurait été le premier à donner un sens plus précis au concept de Philosophie. Une confirmation de cette thèse provient de Diogène Laerce. Celui-ci rapporte que, selon Pythagore, la qualité de sage ne convient à aucun homme, mais á Dieu seul. L’homme, en revanche, doit se contenter « d’aimer et de poursuivre la sagesse ».  (mettre la référence) On ne peut guère se fier á cette tradition pythagoricienne. Par contre, il semble qu’Héraclite dans ses fragments (85) a parlé de philosophe. À l’époque des Sophistes et de Socrate, le terme Philosophia s’emploie pour désigner l’exercice systématique de toute connaissance théorique. Ainsi á partir de là, le sens du mot a évolué et s’est précisé. Cf. RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 2.
[51] KINYONGO, Jeki Jean, Épiphanies de la philosophie africaine et négro-américaine. Débats sur leur essence et leur existence, Munich-Kinshasa-Lubumbashi, 1989, p. 19. Heidegger va aussi dans le même sens quand il affirme que Philosophos est opposé à Philarguros, i.e. celui qui aime (qui a l’amour de) l’argent.  Le Philosophos est celui qui aime le Sophon. Mais aimer le Sophon ne signifie rien d’autre qu’homologein, i.e. « parler comme parle le logos » ; en d’autres termes, correspondre au logos dans l’harmonie, l’accord. Cf. HEIDEGGER, M. Qu’est-ce qu’est la philosophie, p. 35. 
[52] Cf. C’est de Paul Gilbert, dans son livre Une sagesse plus pratique que théorique, (p.4) que nous tirons ces explications. 
[53] ARISTOTE, Métaphysique , A, 2, 982a 7-19.
[54] Ibidem. Lire également NKERAMIHIGO, T., Op. Cit, p. 25-28.
[55] KINYONGO JEKI, cité par Ntima, p. 10.
[56] PLATON, Phèdre, 278 d.
[57] PLATON, Théétète, 145 e ; La République, 619 d ; Sophiste, 253 e ; Phédon, 67, e.
[58] On peut, à ce niveau, se référer à Pythagore (569-494 av. J.-C. env.) qui interdisait á ses disciples de se nourrir d’œufs et de croquer les fèves (plante légumineuse dont les graines se consomment fraîches ou conservées sèches). Diogène de Sinope (surnommé le Cynique ou le philosophe aux pieds nus 413 à Sinope – 327 Corinthe av. J.C.)  (ou qui dort dans un tonneau.  
[59] L’on peut ici renvoyer aux moines du M.A avec leur « philosophie selon le Christ » considérée comme la vraie philosophie.
[60] Dans la Crise du Muntu, le philosophe camerounais Fabien Eboussi Boulaga, décrit l’idéologie comme étant un système (explicite et se voulant cohérent) d’idées originales considérées et présentées comme « rationnelles et raisonnables », mais dont les ressorts effectifs et les présupposées fondamentaux se trouvent ailleurs que dans ce discours explicite. Cf. Le chapitre sur la crise des idéologies.
[61] Le but de la philosophie est de conduire l’esprit jusqu’au point où l’individu reconnaît que la vérité et la bonté ne sont pas en notre libre possession que nous ne pouvons pas nous en rendre maîtres et qu’il nous faut donc engager pour pouvoir accueillir ce qui nous transcende. cité par NTIMA dans son cours, p. 11.
[62] Avec cette intégration, on peut comprendre le caractère infini du discours philosophique. En effet, celui-ci est toujours en recherche d’approfondissement.
[63] RAEYMAEKER, L., Op. cit., p. 26.
[64] Ibidem.
[65] Pour ce deuxième point, nous inspirons largement du cours d’Introduction à la philosophie d’Hélène Laramée, Québec, Chenelière, 3 è édition, 2007, pp. 7-12.
[66] Les exemples suivants peuvent confirmer cette thèse : Aristote se disait philosophe même quand il étudiait l’anatomie des animaux ou qu’il répertoriait les différents types de constitutions politiques existantes.
[67] HERSCH, J., L’étonnement philosophique. Une histoire de la philosophie, Paris, Gallimard, 1993, p. 11.
[68] Le terme Épistémologie vient de deux mots grecs: epistêmê (science, connaissance) et lógos (discours rationnel, théorie, étude). L’épistémologie est donc la théorie de la connaissance ; c’est un questionnement sur l’accessibilité de l’être humain à un savoir vrai. 
[69] Il y a des critères que l’on peut acquérir pour obtenir ou même unir ces différentes propositions à l’intérieur du discours. Ce dont s’occupe la logique.
[70] RAEYMAEKER, L., Op. Cit., p. 64.
[71][71] Cf. LARAMÉE, H., Op. Cit., p. 10. La philosophe donne l’exemple suivant : Je suis enseignant, je suis né en 1963, je suis d’origine congolaise. Cette présentation se comprend facilement. Mais affirmer « je suis », « j’existe » conduit directement á la question « qu’est-ce que cela signifie ? ».
[72] Cf. Ibidem.
[73] Par exemple, comment s’opère la reproduction de telle espèce animale ?
[74] À la question, par exemple, qu’est-ce qu’est essentiellement Mbungu ? » L’on répondra, « Mbungu reste essentiellement un être humain, de sa naissance jusqu’à sa mort, même s’il change de profession, s’il subit un accident et perd l’usage de ses bras, s’il vieillit ».
[75] Mbungu appartient au genre animal et à l’espèce humaine.
[76] Par exemple á la question: „Pourquoi le nouveau-né recherche-t-il la présence de sa mère ? » On répondra : « pour se maintenir en vie ».
[77] Par exemple de manière générale, les biens matériels seront considérés comme ayant moins de valeur que ceux qui se rapportent à la qualité de nos relations.